loup et ses petits

Une thèse FRESH-FNRS sur le loup

Des traces de pas que l’on n’avait plus observées depuis longtemps dans nos bois : il n’y a plus de doutes, ce sont bien des empreintes de loups. De retour en Belgique, on compte à l’heure actuelle deux meutes localisées dans les régions des Hautes Fagnes et de la Campine.  

Quelle est l’histoire de cet animal dans nos régions ? C’est le sujet de thèse de Julie Duchêne, doctorante au Département d’histoire qui se penche sur la présence du Loup en Wallonie du 18e au 20e siècle. Interview.  

Pourquoi le loup a-t-il déserté de nos régions ?

Durant la période française (1792-1815), l’Etat met en place un plan national de régulation des loups (octroi de primes pour encourager leur régulation, organisation de battues par les communes). Avec ce plan, la régulation du loup va se systématiser et gagner en efficacité. L’objectif de l’Etat est alors de réduire les nuisances. L’amélioration des armes va également contribuer à sa disparition, auxquels s’ajoutent des facteurs indirects comme la réduction de son habitat naturel due au développement de l’agriculture et de l’élevage. Les territoires deviennent beaucoup plus morcelés et un amoindrissement de la faune est constaté. Son habitat étant réduit et la nourriture étant plus difficile à trouver, le loup va se reporter sur des proies domestiques c’est-à-dire le bétail. Les éleveurs le voient alors d’un mauvais œil, comme un grand prédateur qui représente une menace pour le bétail.  

Le loup a-t-il toujours eu mauvaise réputation à l’image de nos contes traditionnels qui lui donnent un aspect effrayant ?

Tout d’abord, on ne peut pas dire que l’homme a une peur irrationnelle du loup sans quoi il ne le chasserait pas. Cela signifie que l’homme n’a pas peur du loup mais a plutôt des craintes par rapport à son comportement nuisible et aux dommages qu’il peut occasionner en s’attaquant au bétail. Certaines thèses qui ont été réalisées en France démontrent par ailleurs l’influence de la religion catholique sur notre imaginaire et notre perception du loup : Jésus guide les croyants comme le fait un berger avec ses moutons et le loup lui, menace les moutons et incarne, en quelque sorte le diable.

Par ailleurs, le loup a aussi une mauvaise réputation dans certains contes comme « Le Petit Chaperon rouge ». Parmi les nombreuses interprétations du conte, l’une d’elles stipule que le loup représente un prédateur sexuel.

Toutefois, le loup n’a pas toujours été perçu négativement. Par exemple, pendant l’Empire romain, la louve était l’animal-symbole de Rome. Il apparait donc clairement que selon la société dans laquelle on évolue, l’image du loup peut varier au fil du temps, et passer du côté positif au côté négatif ou inversement.  

Le point de vue de Benoît Muylkens, Directeur du Département de médecine vétérinaire

Benoît Muylkens évoque les problèmes liés à la cohabitation entre les loups et les éleveurs.  

« On ne peut pas dire que ces locataires « surprises » font des heureux dans le monde de l’élevage. En effet, pour éviter les attaques, certains éleveurs à proximité des meutes doivent prendre des mesures qui sont coûteuses. Il faut parfois se munir de clôtures, parfois électrifiées mais c’est un gros investissement. Autre solution, avoir un chien adapté à la protection des troupeaux mais là encore, ce type de chien est difficile à trouver et à éduquer n’est pas chose aisée. La réapparition de ces prédateurs contribuera certainement à une meilleure régulation des grands ongulés dans les forêts (Cerfs, chevreuils, sangliers). Leur densité excessive cause des dégâts aux arbres et arbustes.  Le retour du loup contribuera à réguler ces populations dans les biotopes sauvages mais la proximité des élevages ovins entraîne des attaques indésirables ». 

Le loup, un coupable idéal

Des attaques, certes il y en a mais ce n’est pas toujours la faute au loup contrairement à ce qu’on pourrait penser. Benoit Muylkens nuance : « Dans de nombreux cas, les attaques dites « par le loup » sont en réalité le fruit d’attaques de chiens ou la conséquence de mortalités naturelles mais comme il y a une présence du loup, c’est plus facile d’imputer la faute au loup. Or les analyses génétiques réalisées de manière systématique par les experts du réseau loup le démontrent sur toutes les suspicions d’attaque pour lesquelles ils sont mandatés, le loup peut dans de nombreux cas être exclu comme cause de mortalité ». Selon lui, le fait de pointer systématiquement du doigt le loup n’est pas totalement justifié, surtout quand on sait que d’autres espèces sauvages posent d’autres problèmes. « Toutes les semaines, il y a des accidents de voitures causés par des traversées de gibiers sur nos routes sans qu’il n’y ait décho dans la presse.  Or, on entend plus parler des attaques de loups qui se produisent certes, mais à des fréquences assez faibles. » précise-t-il.  

 Mais le sujet « loup » est plus médiatique...

Conférence sur le loup à l’UNamur : un sujet qui passionne !

Plus de 200 personnes ont assisté le 9 mars à la conférence « Le retour du Loup en Wallonie », et une centaine de personnes l’ont suivie en ligne ! Organisée par Laurent Tallier, du service Vie de la communauté universitaire (Vecu) de l’UNamur et par les étudiants du cercle vétérinaire de l’UNamur, la conférence donnait la parole à différents intervenants dont Alain Licoppe, responsable du « Réseau Loup » au SPW qui a fait le point sur le Plan Loup et Johan Michaux, professeur à l’ULiège et directeur du laboratoire Génétique de la Conservation venu expliquer ses recherches en matière d’analyse génétique du loup.

Affiche retour du loup

Plusieurs éleveurs ovins étaient également présents et ont partagé leur point de vue sur la thématique. Lors de cette conférence, Alain Licoppe est notamment revenu sur l’origine des deux meutes de loup installée en Belgique. Selon l’expert, celle installée en campine est issue de la lignée germano-polonaise qui a migré depuis le Nord de l’Allemane. La deuxième implantée sur le territoire des Hautes Fagnes provient d’individus qui ont migré à partir de la population italo-alpine.  

Par ailleurs, le public a eu l’occasion de découvrir une dizaine de panneaux didactiques expliquant divers aspects de la biologie, du comportement et des flux migratoires des loups. Une soirée placée sous le signe du succès !