Cet article est tiré de la rubrique "L'invité" du magazine Omalius de mars 2024.

Omalius : Vous accompagnez des centaines d’entrepreneuses – entrepreneurs dans leur projet de création de start-up : comment se porte cette dynamique ? Le contexte actuel est-il propice à l’entrepreneuriat ?

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Roald Sieberath : Il existe plusieurs paramètres qui démontrent qu’actuellement l’entrepreneuriat est dans une voie dynamique et porteuse. Si on regarde par exemple l’évolution de l’entrepreneuriat sur une dizaine d’années, on constate qu’aujourd’hui, c’est beaucoup mieux accueilli. Il existe des filières entrepreneuriales dans quasiment toutes les universités. Ce n’était pas le cas avant. Je me suis retrouvé à être entrepreneur à 25 ans. J’étais le martien par rapport à mes camarades de promotion en gestion.

Aujourd’hui, ça a évolué : c’est rentré dans les pratiques de nombreuses filières de formation de l’enseignement supérieur, et plus uniquement dans celles de gestion. Nous voyons que les profils des personnes qui se lancent dans l’entrepreneuriat sont beaucoup plus variés qu’auparavant : on y retrouve des historiens, des philosophes, des informaticiens. C’est très encourageant. Mais j’appelle aussi à la prudence parce que l’entrepreneuriat c’est sauter d’une falaise et construire son avion en tombant. Et certains réussissent. Cela démontre le côté audacieux d’un projet entrepreneurial. Ce n’est pas donné à tout le monde. Il y a notamment une série de qualités humaines et intellectuelles dont il faut disposer pour développer un projet entrepreneurial.

O. : Comment percevez-vous la réponse des universités face à ce regain d’enthousiasme et d’accessibilité autour de l’entrepreneuriat ?

R.S. : Il y a une nette évolution dans le chef des acteurs de l’enseignement supérieur, avec la mise en œuvre de nombreux programmes d’accompagnement, avec par exemple la présence d’incubateurs pour faire émerger des projets portés par des étudiants, tout en leur permettant de poursuivre en parallèle leur parcours de formation. Se faire accompagner, se faire aider est très important dans le processus entrepreneurial. Par ailleurs, les universités ont un rôle à jouer dans la capacité à faire émerger la réflexion divergente, à envisager des solutions multiples. C’est un préalable à l’entrepreneuriat. Là aussi, il y a des skills utiles à développer et les universités doivent pouvoir relever ce défi.

O. : Les entreprises sont-elles aussi réceptives à cette dynamique entrepreneuriale ?

R.S. : C’est en effet une autre bonne nouvelle : les grandes entreprises sont plus ouvertes à collaborer avec les start-ups. Avant, c’était deux planètes séparées. Aujourd’hui, les unes et les autres se parlent. Et les entreprises se tournent vers les start-ups pour aller chercher notamment des qualités d’innovation. Cette capacité d’innovation, à aller chercher des solutions nouvelles, est fondamentale dans notre société, en transition. C’est d’ailleurs, cette relation et ce besoin d’innovation pour notre société que j’aborde dans mon cours du master BAGI.

O. : En tant que Président du CA de l’ADN, quel regard portez-vous sur le déploiement du numérique en Wallonie ? Et comment y associer les acteurs de l’enseignement supérieur ?

R.S. : Lorsqu’un secteur se numérise, il ne fait pas que se transformer, mais il se réinvente. Le numérique élargit considérablement le champ des possibles. Mais il y a des précautions d’usages à prendre lorsqu’on s’attaque à la numérisation d’un secteur. Je pense par exemple aux risques liés à la manipulation de l’intelligence artificielle. Et c’est à ce niveau-là que le milieu éducatif et les universités ont leur rôle à jouer : éduquer au numérique, mais aussi poursuivre les recherches dans ce domaine en veillant à croiser les expertises. L’UNamur d’ailleurs dans ce domaine, jouit d’une réelle reconnaissance avec ses différents centres de recherche où informaticiens, juristes, économistes réfléchissent de manière conjointe aux différents axes de développements du numérique (notamment au sein du NADI, NDLR). L’ADN plaide aussi pour un déploiement du numérique dans notre société, qui tienne compte de l’aspect humain. L’humain doit rester au cœur de toute numérisation. Nous devons par ailleurs poursuivre les efforts entrepris dans le cadre de "DigitalWallonia4.ai", le plan wallon qui a pour objectif principal d'accélérer l'adoption de l'intelligence artificielle en Wallonie et le développement de l'écosystème wallon de l'IA. Ce travail se fait dans une optique multisectorielle et multidisciplinaire, où les expertises se croisent, se répondent et se nourrissent. L’ADN y œuvre activement et se réjouit de voir des acteurs, tels que l’UNamur, être à ses côtés pour faire avancer la Wallonie dans le domaine du numérique.

O. : Quelle place doit prendre l’intelligence artificielle dans le parcours de formation des étudiants ?

R.S. : L’IA dans le domaine de l’enseignement et plus particulièrement dans le supérieur doit être vue comme une réelle opportunité, mais à encadrer. L’UNamur s’en est d’ailleurs très vite rendu compte en menant notamment toute une réflexion sur l’utilisation de ChatGPT dans ses missions d’enseignement. S’il faut donc envisager l’IA comme source d’opportunité, et l’encourager dans toutes les facultés, elle doit rester un adjuvant. La créativité restera de la compétence et de la force humaine. Il faut continuer à la stimuler, à l’encourager. Et à former aussi les jeunes à cette créativité. C’est cette dernière qui sera aussi un facteur déterminant dans le développement entrepreneurial, qui comme celui du numérique, est un enjeu clé pour notre société future.

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Proposé depuis 10 ans par la Faculté d’informatique, le Master de spécialisation Business Analysis /IT Governance & Innovation (BAGI) offre une formation interdisciplinaire orientée sur des aspects ciblés de l’informatique et de la gestion en phase avec les domaines de l’analyse business, de la gouvernance IT et de la gestion de l'innovation.

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Cet article est tiré de la rubrique "L'invité" du magazine Omalius #32 (Mars 2024).

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