Inventaire, description et valorisation

C’est un ambitieux chantier qu’ont initié les professeurs Xavier Hermand et Jean-François Nieus (Centre de recherche PraME, Département d’histoire) : l’inventaire, la description et la valorisation scientifique et culturelle du patrimoine médiéval de la BUMP. Celle-ci abrite en effet un riche ensemble composé à la fois de manuscrits dits « de bibliothèque » et de documents d’archives, de nature et de provenance diverses, et qui couvrent une large fenêtre chronologique (9e-16e siècle). Malgré son intérêt indéniable, ce patrimoine reste méconnu, n’ayant jamais fait l’objet d’une étude particulière. Le projet de recherche lancé par le centre PraME, en collaboration avec la BUMP et avec le soutien de la fondation d’utilité publique Institut Moretus Plantin, va permettre de dévoiler aux scientifiques et au grand public l’existence et l’intérêt de ces manuscrits.  

Patrimoine BUMP 3

Nicolas Michel, chercheur postdoctorant au Centre PraME, s’est vu confier depuis quelques mois la première phase du projet, qui porte sur l’inventaire et l’analyse des parchemins issus de la production livresque au Moyen Âge, qu’ils soient complets ou fragmentaires. « La BUMP conserve une quinzaine de manuscrits complets, au contenu très varié : ouvrages liturgiques, textes normatifs, recueils de disputes universitaires… », explique Nicolas Michel. « L’ensemble contient plusieurs pépites, comme un manuscrit rarissime de la règle des Camaldules (ordre monastique fondé au 10e siècle, NDLR), daté du 13e siècle ou, plus tardivement, le traité d’héraldique de Roland Bournel, dont seulement 5 exemplaires manuscrits du 16e siècle sont connus dans le monde. Celui de Namur est encore totalement inconnu des scientifiques ». Ces codex feront l’objet d’enquêtes spécifiques, mais également d’une valorisation sur Neptun, le portail numérique de la BUMP.  

Des fragments de manuscrits, témoins de l’histoire du livre

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L’attention de Nicolas Michel se porte également sur les fragments de manuscrits découpés et « recyclés » par leurs propriétaires aux 16e et 17e siècles, à une époque où l’imprimerie sur papier prend le pas sur la copie des textes à la plume et sur parchemin. « Des feuillets, des demi-feuillets ou des languettes de manuscrits sont insérés à divers endroits de la reliure du livre imprimé afin de la renforcer ». 150 fragments avaient déjà été repérés par Thomas Falmagne, chercheur à la Bibliothèque nationale du Luxembourg et collaborateur régulier du centre PraME, 30 de plus ont été retrouvés par Nicolas Michel. L’immense majorité des manuscrits transcrits au Moyen Âge ayant disparu, ces fragments constituent des témoins uniques de la culture de l’écrit, révélant l’existence des textes et des copistes qui leur ont donné vie.  

Seulement 8.000 à 10.000 manuscrits antérieurs à l’an mil sont conservés dans le monde. Chaque témoin est donc intéressant.

L’inventaire laisse déjà entrevoir tout le potentiel de la recherche, avec une grande diversité typologique : « Là où on se serait attendu de prime abord à trouver une grande quantité de manuscrits liturgiques – missels, bréviaires, livres d’heures –, on est en présence d’un quart, voire un tiers de textes universitaires, essentiellement de type juridique, commentaires de droit canon et décrétales pontificales. On trouve aussi un fragment de Bible en moyen néerlandais des 13e-14e siècles, un Lancelot en prose du milieu-troisième quart du 13e siècle, dont le texte diverge de l’édition de référence, quelques textes médicaux ou de pseudo-alchimie… », continue Nicolas Michel. Une diversité qui questionne : « Même si des études se font jour, on comprend encore mal quels sont les critères qui poussent les individus à choisir tels ou tels manuscrits pour les recycler. Quelle est leur origine, y a-t-il un lien entre le texte copié sur le manuscrit et la thématique du livre dans lequel il s’insère ? ». Plusieurs fragments se révèlent exceptionnels, comme celui d’un bréviaire pontifical datant de la première moitié du 9e siècle : « Seulement 8.000 à 10.000 manuscrits antérieurs à l’an mil sont conservés dans le monde. Chaque témoin est donc intéressant », souligne le chercheur.  

Patrimoine BUMP

Une dimension européenne

Ce projet s’insère dans une dynamique de recherche qui se développe à l’échelle mondiale autour des fragments de manuscrits. La BUMP est en effet la première bibliothèque universitaire en Fédération Wallonie-Bruxelles à participer au Fragmentarium - Digital Research Laboratory for Medieval Manuscript Fragments. Cette base de données, lancée par l’Université de Fribourg, donne accès à près de 5.000 fragments de manuscrits repérés par les scientifiques. Fragmentarium est doté d’un outil de recherche qui permet de rassembler les parties d’un même manuscrit éparpillées dans les reliures de volumes conservés aux quatre coins du monde.  Les 180 fragments namurois viendront bientôt rejoindre cette plateforme. « C’est une collaboration avantageuse de part et d’autre : nous effectuons le travail d’identification, la notice scientifique descriptive du texte et la numérisation ; Fragmentarium opère, si possible, une reconstitution et permet l’accès à cette énorme banque de données », conclut Nicolas Michel. 

Prochaine étape : les documents d’archives

Après l’inventaire, la description, la numérisation et l’encodage des fragments dans la base de données européenne, le projet prévoit la réalisation d’un catalogue des manuscrits complets et leur valorisation sur Neptun. Début 2024 démarrera l’analyse des écrits d’archives, avec l’arrivée de Romain Waroquier, actuellement chercheur doctorant au Centre PraME, qui apportera son expertise complémentaire. Le projet se poursuivra jusqu’en 2025, grâce au soutien de l’Institut Moretus Plantin. A suivre ! 

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Le centre de recherche « Pratiques médiévales de l’écrit » de l'Université de Namur réunit une vingtaine de chercheurs qui consacrent leurs travaux aux multiples facettes de l’activité d’écriture à travers l’Europe « latine » durant un long Moyen Âge qui s’étend de la fin de l’Empire romain à la première Renaissance.

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