Cet article a été réalisé pour la rubrique "Eurêka" du magazine Omalius #32 de mars 2024.

Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l’homme en Occident. Dans l’Union européenne, chaque année, pas moins de 335 000 nouveaux cas sont détectés, et près de 70 000 morts lui sont attribués.

Pourtant, malgré de grandes avancées dans son dépistage et sa prise en charge, ce cancer reste encore mal compris. En cause, des origines multifactorielles et une grande hétérogénéité entre les patients. Le réseau de formation doctorale MSCA a donc pour ambition d’améliorer cette compréhension, tout en formant la prochaine génération de chercheurs, grâce à un regroupement d’expertises multidisciplinaires.

Durant 4 ans, le programme PROSTAMET réunira 15 partenaires composés d’universités européennes et d’entreprises biomédicales, afin de développer de nouvelles molécules actives contre le cancer. « Ce type de recherche est complexe, en particulier lorsque l’on veut concevoir de nouveaux médicaments », éclaire Catherine Michaux, maître de recherche FNRS et professeure à l’UNamur. « Différentes compétences sont nécessaires : des biologistes, des chimistes, des pharmaciens… C’est cette multidisciplinarité qui rend ce projet si intéressant. »

Dans cette optique, PROSTAMET se concentrera sur le rôle central des lipides. « Au sein des cellules cancéreuses, de nombreuses voies biochimiques sont perturbées, dont le métabolisme des lipides », résume Catherine Michaux. « Et l’équipe de recherche à la KU Leuven, spécialisée dans le métabolisme lipidique et coordinatrice du projet, a d’ores et déjà identifié plusieurs enzymes qui pourraient devenir de nouvelles cibles dans le traitement du cancer de la prostate. »

 

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Un problème de blocage

Trois groupes de travail œuvreront en parallèle. Le premier se concentrera sur l’étude des changements qui s’opèrent dans le métabolisme lipidique au sein du cancer de la prostate, tandis que le deuxième explorera in vivo les points-clés de ce métabolisme et de potentiels biomarqueurs du cancer. « Mon groupe de travail, quant à lui, se focalisera sur une enzyme impliquée dans le métabolisme des lipides », développe Catherine Michaux. Cette enzyme, l’aldéhyde déshydrogénase 1A3, participe à la résistance des cellules cancéreuses à la ferroptose, un type de mort cellulaire. « Et en tant que biochimiste, je m’attacherai à étudier sa structure dans l’espace dans le but d’imaginer quel type de molécule pourrait venir bloquer son mode de fonctionnement », continue-t-elle.

La chercheuse travaillera notamment en collaboration avec la société italienne IRBM, ainsi qu’un laboratoire de l’Universitad del Piemonte Oriental, en Italie. « Nos compétences sont complémentaires, et mon laboratoire se distingue entre autres pour notre savoir-faire en modélisation moléculaire », précise-t-elle.

Cela permettra à la chercheuse de simuler informatiquement le blocage de la protéine grâce à de petites molécules, avant de vérifier ces résultats expérimentalement. « La modélisation est un gain de temps et de moyens précieux », juge-t-elle. « Cela évite de tester inutilement des quantités de produits, mais aussi, en ne choisissant que des molécules ayant déjà été sélectionnées pour d’autres usages médicaux, d’arriver plus vite à un médicament potentiel. »

Le plein de compétences

En plus de chercher de nouveaux traitements, le programme PROSTAMET est aussi et avant tout un programme pointu de formation de nouveaux doctorants. « Neuf doctorants seront sélectionnés pour ce programme, et tous devront être en mobilité », indique Catherine Michaux. « Cela signifie que celui qui travaillera dans mon laboratoire viendra de l’étranger, mais aussi que tous devront, au cours de leur thèse, faire un séjour de quelques mois dans un autre laboratoire partenaire. »

De plus, les étudiants visiteront plusieurs hôpitaux et laboratoires, et devront assister à plusieurs écoles doctorales d’été centrées sur l’étude du cancer. Au programme, des cours sur l’éthique, l’analyse de données ou encore l’IA dans l’assistance au Drug Design. « C’est un programme intensif, qui donnera à ces futurs chercheurs des compétences inestimables pour leur carrière », estime Catherine Michaux.

L’UNamur est engagée dans de nombreuses recherches sur le cancer. Entretien avec Carine Michiels, vice-rectrice à la recherche.

Carine Michiels

Omalius : Comment est organisée la recherche contre le cancer à l’UNamur ?

Carine Michiels : Toute cette recherche est regroupée au sein de l’Institut NARILIS. Il est partagé à la fois par les chercheurs et les membres du CHU UCL Namur de Mont-Godinne. Cela permet d’avoir des interactions riches entre la recherche fondamentale et les cliniciens, et de développer une recherche translationnelle.

O. : Quels sont les aspects couverts par l’UNamur ?

C.M. : Il y en a principalement cinq. Le premier concerne l’étude de la résistance des cellules cancéreuses aux différents traitements. Ensuite, on retrouve des études menées sur le rôle des virus dans l’induction des cancers, et d’autres sur leur interaction avec les cellules sénescentes. Et enfin, il existe des travaux sur la métabolomique.

O. : Vous aviez mentionné cinq domaines…

C.M. : Le dernier est sans doute le plus développé. Il s’agit de la radiothérapie. Nous disposons d’un accélérateur de particules, unique en Fédération Wallonie-Bruxelles, qui nous permet de faire des études concernant les effets de la protonthérapie sur les différents types de cellules qui composent une tumeur. Elles ont notamment permis de démontrer une réelle plus-value par rapport à la radiothérapie conventionnelle à rayons X.

L'UNamur en soutient au Télévie

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Depuis de nombreuses années, la communauté universitaire et ses partenaires se mobilisent au profit de l'opération Télévie et de la recherche contre le cancer. L'intégralité des dons collectés est reversée au FNRS.

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Cet article est tiré de la rubrique "Eurêka" du magazine Omalius #32 de mars 2024.

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