En décembre 2022, l’arrivée de ChatGPT, suscitait de nombreuses réactions dans la société, y compris dans le domaine de l’enseignement supérieur. A l’UNamur, une vaste réflexion a spontanément été menée par de nombreux professeurs, chargés de cours, assistants, et responsables pédagogiques pour analyser la manière dont ce nouvel outil pouvait s’intégrer dans le parcours pédagogique de l’étudiant. Rapidement, plusieurs professeurs, issus de diverses Facultés, ont fait le choix de demander à leurs étudiants d’utiliser ChatGPT, dans le cadre de leur cours. Objectifs ? Evaluer les forces et les faiblesses de l’outil et in fine renforcer l’esprit critique de chacun.

Aujourd’hui, après un quadrimestre de test et d’enquête, l’heure est au bilan. Début juillet, un workshop a ainsi mobilisé de nombreux acteurs de la pédagogie à l’UNamur afin d’échanger sur les bonnes pratiques observées et les écueils identifiés.

Les pratiques utilisées dans les cours de l’UNamur

Michaël Lobet carré

Michaël Lobet - Faculté des sciences

ChatGPT a été utilisé dans un cours de physique en 1e bachelier sciences vétérinaires et biologiques (~250 étudiants). Les étudiants ont dû préparer une séance d’exercices d’optique à partir de ChatGPT. La prise de recul des étudiants face aux réponses fournies par l’IA a été mesurée dans une enquête réalisée par le Service de Pédagogie Universitaire - SPU (Marie Lobet et Valérie Wathelet) auprès de 192 étudiants. Des résultats intéressants en ressortent en termes de craintes des étudiants face aux IA, d’intérêt ou de méconnaissance de cet outil et surtout une quantification de la prise de recul face aux réponses fournies.

Xavier Devroey - Faculté d'informatique

Il a eu recours à d’autres types d’IA utilisées dans les cours de bachelier (IA et programmation symbolique, IA et optimisation) et de master (Data science, software engineering et option IA). Les étudiants d’informatique sont friands de nouveautés technologiques. Les étudiants ont notamment été incités à écrire un article pseudo-scientifique en utilisant ChatGPT ou à détecter des erreurs dans des codes informatiques.

Xavier Devroey
Nathalie Kirschvink

Nathalie Kirschvink - Faculté de médecine

ChatGPT a été utilisé dans un cours (travaux dirigés/travaux pratiques) de physiologie en 1e bachelier médecine (~200 étudiants) et 2e bachelier sciences pharmaceutiques et sciences biomédicales (~250 étudiants). Les étudiants ont été invités à poser des questions à ChatGPT pour préparer une séance de TP/TD. Objectif ? Réfléchir sur la qualité de la question qu’ils ont posé à l’IA, le niveau de précision et de complexité de celle-ci ainsi que sur la qualité de la réponse obtenue par la machine.

Elise Degrave - Faculté de droit

ChatGPT a été utilisé dans le cours de « Sources et principes du droit » en 1e bachelier droit (~500 étudiants). Les étudiants doivent analyser une œuvre, la résumer et définir trois questions de droit en lien avec le cours. Les étudiants ont dû également formuler des questions à l’aide de ChatGPT et critiquer la production de l’IA, par rapport à leurs questions personnelles.

Elise Degrave carré
Simon Labate carré

Simon Labate - Ecole des langues vivantes (ELV)

ChatGPT a été utilisé dans des cours d’anglais à destination d’historiens, historiens de l’art et romanistes (Faculté de Philosophie et Lettres) ainsi que dans des cours de français. Simon Labate a développé par exemple les utilisations créatives émanant de ChatGPT tels que des « crossover » : les « prompts » étaient du style « Raconte-moi l’histoire du dessin animé « Ratatouille » dans le style de Jacques Chirac », « Raconte-moi l’histoire de Raiponce dans le style de Donald Trump » ou encore « Ecris l’histoire où Indiana Jones rencontre Han Solo ». D’autres usages ont également été testés pour améliorer les productions écrites ou résumer des textes.

Pietro Zidda - Faculté des sciences économiques, sociales et de gestion

La Faculté s’inscrivant dans le projet « Learning by doing », l’utilisation de ChatGPT y a été fortement encouragée. Les étudiants ont testé des analyses Atouts/Faiblesses/Opportunités/Menaces (AFOM, en anglais SWOT). Les étudiants ont dépassé la production de base de l’IA et ont réalisé des analyses croisées des différentes cases de ces analyses SWOT.

Pietro Zidda carré
Christelle Hoorelbeke carré

Christelle Hoorelbeke et Marc Miceli - Ecole des langues vivnates (ELV)

L’Ecole des langues vivantes (ELV) a déjà beaucoup d’expérience avec l’IA et l’enseignement, étant rompus à l’utilisation de « Google Translate » ou « Deepl ». Les professeurs Miceli et Hoorelbeke ont utilisé ChatGPT dans un cours de néerlandais pour les 3e bachelier donné en Faculté des sciences économiques, sociales et de gestion). Le cours vise à les préparer au monde du travail et par conséquent la rédaction d’une lettre de candidature fait partie de la matière. Les enseignants ont analysé avec les étudiants la réponse que propose ChatGPT. Si elle est fournie rapidement et est grammaticalement et lexicalement riche, elle manque de personnalisation. Les étudiants ont été invités à avoir un esprit critique face à la production de l’IA.

Les débats ont également reçu l’éclairage du professeur Benoît Frénay, spécialiste des intelligences artificielles et de l’apprentissage automatique (machine learning). Ce dernier a résumé aux participants du workshop tout ce qu’il faut savoir sur l’IA et ChatGPT en 15 minutes.

Parallèlement à l’initiative de Marie Lobet du Service de Pédagogie Universitaire, une étude a été lancée à destination de tous les étudiants de BAC1. L’équipe de recherche, composée de Marie Lobet, Valérie Wathelet et Antoine Honet s’est concentrée sur l’utilisation et la connaissance de l’IA dans leurs cours et travaux. Le workshop a donc été le moment idéal pour Marie Lobet, de présenter les résultats. Les étudiants étaient invités, au travers de cette enquête anonyme, à dire s’ils utilisaient régulièrement des outils d’intelligence artificielle et si oui lesquels, dans quelles situations en faisaient-ils usage, et les avantages qu’ils ont constatés de cette utilisation. 

Découvrez les résultats de cette enquête dans un de nos précédents articles : Usage de ChatGPT par les étudiants : l'intelligence artificielle a la côte

Le résumé de cette enquête en trois chiffres

1233

étudiants de Bloc 1 ont participé à cette enquête

13%

d'étudiants disent avoir utilisé ChatGPT dans leurs cours

67%

des étudiants interrogés utilisent d'autres outils d'intelligence artificielle dans le cadre de leurs cours (par exemple Google Translate ou encore DeepL)

Notons enfin que le workshop, organisé notamment par l’équipe PUNCH (Guillaume Mele) s’est terminé par une table ronde animée par Gaëlle Chapelle du département Education et Technologie (future Faculté des sciences de l’éducation et de la formation – FaSEF). Pendant plus d’une heure, de nombreux membres de l’UNamur ont échangé leur point de vue et leurs expériences.

Les questions soulevées et débattues

  • Comment former les étudiants à l’utilisation de ChatGPT ? Comment, par exemple, les aider à formuler correctement les questions formulées à l’outil, les fameux « prompts » ?
  • Comment développer encore davantage l’esprit critique des jeunes face à ces nouvelles technologies ?
  • Quel cadre juridique doit encadrer l’utilisation de ChatGPT, notamment dans les pratiques pédagogiques ? ChatGPT est-il un outil auquel l’on a recours, comme un correcteur orthographique, ou un auteur à part entière, qu’il convient de citer dans les règles de l’art ?
  • Quid du respect du RGPD et du stockage des données ?
  • Comment éviter d’aggraver la fracture numérique quand toute la population n’a pas accès à cet outil ?
  • Quel rôle doit jouer l’université dans l’accompagnement de la société et plus particulièrement des enseignants du fondamental, face à l’utilisation de l’IA dans les pratiques pédagogiques ?

Ces questions sont autant de perspectives pour alimenter les débats qui animent l’institution face aux changements suscités par l’émergence de l’IA. Elles vont par ailleurs continuer à être investiguées à l’UNamur par une équipe pluridisciplinaire dédiée à ChatGPT. L’objectif est de continuer à explorer l’utilisation de ces nouveaux outils pour mieux les intégrer dans les pratiques pédagogiques et le quotidien des étudiants.  

Découvrez aussi l’article diffusé dans le magazine Omalius consacré à l’utilisation de l’intelligence artificielle dans la pratique pédagogique à l’UNamur :

ChatGPT, une opportunité pour l'enseignement